Repérer les poissons dans leur élément : les signes à rechercher

L'observation est un atout très important dans la pêche. © Enjoy Fishing / Jean-Baptiste Vidal

De nos jours, la pêche à la mouche est pratiquée pour un grand nombre d'espèces qui se comportent et se manifestent de manières distinctes par rapport à leur régime alimentaire et leurs proies. Avec l'expérience acquise au fil des années, on engrange un large panel de notions et d'aptitudes qui misent bout à bout nous permettent d'être de meilleur « prédateur ».

L'observation, la connaissance des écosystèmes aquatiques et du comportement des poissons, et le repérage de « signes » sont autant d'atouts et d'indices qui peuvent aider le pêcheur sportif à mieux tirer profit de ses parties de pêche.

Les signes : mouvements d'eau, chasses, vagues

Pour se nourrir, de nombreux poissons créent des « signes » ou manifestations qui sont visibles par le pêcheur aguerri qui sait où et quoi chercher. Que ce soit le brochet ou tout autre prédateur (sandre, perche, silure, aspe,…), le bar, ou encore le dorado que j'ai beaucoup traqué à l'étranger, leurs chasses dans les poissons fourrages, que ce soit sur des hauts fonds ou à certains moments de l'année, près des bordures ou en surface, nous renseignent sur leur présence. Lorsqu'une chasse se produit, les poissons sont actifs et donc mordeurs. Néanmoins, il est important de rapidement trouver la taille et le coloris de la mouche à employer et lancer sans attendre dans la zone concernée. Dans la majorité des cas, vous prendrez un ou deux poissons avant une nouvelle période d'accalmie. Puis il faudra trouver à nouveau leur position avant de réaliser de nouvelles captures.

En mer, certains prédateurs peuvent également être repérés grâce à leur chasse en surface. J'ai pu prendre lors d'un séjour aux Seychelles un très gros barracuda qui venait de jeter son dévolu sur un petit banc de mulets et qui avait attiré mon attention.

Ce gros barracuda s'est laissé trahir en chassant dans un banc de petit mulet. Une fois repéré l'auteur a pu le traquer et lui proposer sa mouche
Ce gros barracuda s'est laissé trahir en chassant dans un banc de petit mulet. Une fois repéré l'auteur a pu le traquer et lui proposer sa mouche.

En Argentine, dans l'Estero del l'Ibera, une des zones humides les plus vaste de ce pays, un des guides avait remarqué que les dorados effectuaient des petites vagues lorsqu'ils se déplaçaient en petit groupe pour chasser dans les lagunes. Lorsque le vent était absent et la surface de l'eau lisse, bien souvent au lever du jour, il était courant de pouvoir observer ce phénomène et arriver à présenter une imitation de poisson fourrage sur la trajectoire d'une de ces vaguelettes.

De la même façon, je me souviens que mon guide Juan au Mexique m'a permis de prendre plusieurs permits dans la lagune proche du lodge en pêchant également sur des « eaux nerveuses» ou vaguelettes créées par un ou plusieurs permits en déplacement sous la surface.

Dans ces deux cas, la difficulté réside dans le fait d'identifier la vaguelette du poisson en question puis d'arriver à lancer très précisément et discrètement à un mètre devant la vague malgré le vent, le déplacement des poissons et la montée d'adrénaline !

Ces dernières années, je me suis concentré sur la recherche des bars à vue en estuaire. Ils se nourrissent principalement de crevettes et de crabes, mais également de petits poissons divers (mulets, sprats, gobies,…) et viennent dans très peu d'eau à leur recherche. Très souvent, en se déplaçant ils créent une onde ou encore effrayent les crevettes postées sur les bordures qui frétillent et sautent à la surface. Ces indices peuvent passer inaperçus pour le néophyte, mais pour le pêcheur à vue confirmé, ils permettent souvent de localiser un poisson avant de s'en rapprocher et de finalement le repérer en maraude sous une touffe de goémons ou de fucus. Par eau sale, les bars sortent même parfois le dos de l'eau pour se gaver de crevettes.

Occasionnellement, il est possible d'entendre également le bruit de succion qu'ils émettent lorsqu'ils ouvrent leur gueule pour aspirer toute une flopée de crevettes ou un petit crabe camouflé dans une touffe de goémon. Dans ce cas de figure, il faut rapidement lancer son imitation de crevette ou un streamer sur ces bordures, car les bars tournent et ne restent pas en place.

Les petites crevettes qui sautent ont permis à l'auteur de repérer rapidement ce poisson pour lui présenter sa mouche
Les petites crevettes qui sautent ont permis à l'auteur de repérer rapidement ce poisson pour lui présenter sa mouche.

En mer, que ce soit pour le bar, ou en exotique pour le tarpon ou encore le bonefish, les oiseaux marins (goelans, sternes, fou de bassant, pélicans,…) peuvent nous aider à localiser nos adversaires du jour.

Je me souviens d'un séjour effectué à Los Roques où sur certaines îles pauvres en flats, nous devions trouver les pélicans pour localiser les bonefish. En effet, les bonefish vénézuéliens se nourrissent beaucoup de petits poissons (sardines notamment) alors que sur la plupart des coins du globe ils mangent principalement des crevettes et des crabes. Ils suivent donc les pélicans qui chassent exclusivement des poissons évoluant en surface. Lorsque les pélicans plongent pour capturer leurs proies avec leur bec profond leur servant d'épuisette, les bonefish foncent littéralement sous les pélicans pour picorer les petits poissons morts ou assommés. Nous devions donc trouver les pélicans et lancer à proximité, puis simplement garder la soie tendue pour sentir la tape du bonefish prenant notre imitation d'alevin blessé !

Vous les voyez? Un banc de permits mexicain est en tailing et nous permet de le repérer
Vous les voyez ? Un banc de permits mexicain est en tailing et nous permet de le repérer.

Manifestation des poissons : tailing, remous, marsouinage

Certains poissons se pêchent exclusivement à vue comme le bonefish, le permit et très souvent le tarpon qu'il serait difficile de capturer autrement.

Pour le bonefish, appelé aussi « grey ghost » ou fantôme gris, il est parfois difficile de les voir évoluer dans l'eau surtout lorsque l'on n'a pas l'habitude. Il faut rechercher une ombre qui se déplace sur le fond. Heureusement, ils viennent dans très peu d'eau pour se nourrir et font parfois ce que l'on appelle du « tailing », c'est à dire basculent leur corps vers l'avant faisant sortir la caudale (tail en anglais) de l'eau pour prendre une proie sur le fond. Dans ce cas, il est possible de voir leur nageoire qui frétille juste au-dessus de la surface de l'eau. Lorsque la luminosité est très faible, c'est parfois la seule possibilité de les localiser. De la même manière, que ce soit au Mexique, à Cuba ou encore au Venezuela, bien souvent le guide longe à pied ou en bateau les spots à permits à la recherche d'une caudale noire s'agitant à la surface de l'eau. Une fois repéré, il est possible de présenter sa mouche sur ces poissons ô combien méfiants et lunatiques.

Dans le cas de la pêche en tailing, c'est très excitant, car nous voyons toute l'action et le poisson dans son élément. La difficulté réside à réaliser un lancer très précis et proche du poisson tout en étant le plus discret possible. J'ai pu prendre de cette façon un gros bonefish au Venezuela (estimé à plus de 4 kg) et un permit trophée à Cuba (près de 20 kg !).

Depuis, nous avons adapté ce type de pêche sur d'autres poissons de deuxième catégorie, très à la mode depuis une dizaine d'année, notamment la carpe ou encore le barbeau qui se nourrissent sur le fond. Très souvent les carpes s'aventurent dans peu d'eau à la recherche de diverses proies. En se nourrissant, à l'instar des espèces marines précitées, il est possible de repérer leur caudale hors de l'eau ou sous la surface. Elles peuvent également créer un nuage de vase lorsqu'elles fouissent sur le fond, ou encore sortir leur dos hors de l'eau dans les herbiers.

D'autres espèces comme le saumon ou l'alose, mais également le tarpon, marsouinent en surface pour des raisons encore mal connues. Certains scientifiques disent que c'est pour se repérer dans leur migration, d'autres pour prendre une bouffée d'air pour regonfler leur vessie natatoire. Ces manifestations visuelles permettent aux pêcheurs de localiser les poissons et donc de pêcher ou d'insister sur un poste donné.

Les carpes se manifestent souvent lorsqu'elles se nourrissent.
Les carpes se manifestent souvent lorsqu'elles se nourrissent.

Repérage sous l'eau : acuité visuelle et habitude

Lorsque l'on pêche à vue en rivière, lac, estuaire ou en mer, on développe avec le temps une vision particulière. Le moindre mouvement, remous, ombre, forme « anormale », nous saute aux yeux. Il faut évidemment travailler cette sensibilité en s'entraînant. Néanmoins, nous ne sommes pas tous égaux sur ce point. Tout le monde n'a pas la même vision et ne perçoit pas les couleurs, les contrastes de la même façon. Sans parler de l'acuité visuelle. Avec un peu d'habitude, il est possible cependant de s'améliorer et d'arriver à identifier un poisson dans son élément.

Vous l'aurez compris, les poissons ont leurs habitudes. En se nourrissant, ils se trahissent parfois et nous laissent des indices qui peuvent nous permettre de les repérer puis de les traquer. Soyez observateur et vous aussi vous verrez que finalement certains petits détails peuvent faire de grandes différences !

Enorme permit cubain capturé par l'auteur alors qu'il faisait du tailing sur une bordure de lagune. Un moment unique!
Enorme permit cubain capturé par l'auteur alors qu'il faisait du tailing sur une bordure de lagune. Un moment unique !

Les lunettes polarisantes, un outil indispensable

Les lunettes polarisantes de qualité sont un outil indispensable pour le pêcheur à la mouche et d'autant plus important lorsque l'on pêche à vue.

Elles offrent un confort de pêche indéniable pour limiter les reflets et protéger des UV, et donc permettent de mieux voir sous l'eau, leur utilisation principale. Mais elles sont aussi utiles pour se protéger les yeux d'une mouche et donc de l'hameçon qui viendrait malencontreusement dans la direction de nos yeux et pourrait nous blesser.

Le choix de la monture dépend du goût de chacun, par contre la couleur des verres est primordiale. Il est bon de posséder plusieurs types de verres pour s'adapter aux conditions rencontrées. Jaune pour faible luminosité - Cuivre/rosé pour les pêches en mer.

Chaque grande marque possède de nombreux modèles.

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