Paroles de guide / Nicolas Gavoille : « Être guide de pêche, c'est gratifiant »

Paroles de guide #10 - Nicolas Gavoille est guide de pêche depuis 13 ans sur le plateau des 1 000 étangs. Après avoir recherché truites et brochets à la mouche ou au leurre, Nicolas va se consacrer à la traque des spécimens.

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Bonjour Nicolas, peux-tu te présenter aux lecteurs de Peche.com ?

Nicolas Gavoille -Je m'appelle Nicolas Gavoille, j'ai obtenu mon diplôme BPJEPS à Ornans (25) il y a 13 ans et depuis, je suis guide de pêche sur le plateau des 1000 étangs (70). Avant de devenir guide de pêche, j'étais géomaticien et je co-dirigeais un bureau d'étude en aménagement du territoire en Lozère. Mon travail consistait à mettre en forme des statistiques et des données géographiques pour produire des outils d'aide à la décision à destination principalement des élus et des services de l'Etat sur des thématiques telles que l'urbanisme, l'environnement, la gestion des risques naturels...

Après 8 ans dans ce domaine, j'ai décidé de revenir m'installer, avec ma petite famille, dans ma région natale. J'y ai rejoint la ferme familiale pour y développer l'activité touristique, déjà démarrée par mes parents avec une maison d'hôtes. J'ai choisi donc de vivre de ma passion en devenant guide de pêche et en construisant le Domaine de la Patte d'Oie sur les terrains et au bord des étangs qui sont la propriété de ma famille depuis 3 générations.

Aujourd'hui, le Domaine de la Patte d'Oie accueille des touristes pêcheurs pour des séjours pêche et détente au bord de l'eau. En effet, ma compagne travaille également sur le domaine, en tant que masseuse, ce qui nous permet de proposer une offre complète pour que les pêcheurs et leur famille puissent y passer un agréable moment.

Tester de nombreux produits Rapala VMC
Tester de nombreux produits Rapala VMC

J'ai également eu la chance de rencontrer très tôt l'équipe Rapala VMC, dont les bureaux et le site principal de fabrication des hameçons VMC se situent à 40 minutes du Domaine. Aujourd'hui, je participe au développement et au test de nombreux produits du groupe sur les thématiques notamment de la pêche au coup ou au feeder, la pêche à la mouche et la pêche de la truite aux leurres. J'ai dessiné par exemple les hameçons VMC7019 et VMC7016 pour les pêches au coup et au feeder et j'ai participé au développement de la gamme de float tube Rapala (FT100, FT120, FT140, FT160) sur lesquels nous avons travaillé pendant 2 ans avant leur sortie en catalogue !

Pourquoi es-tu devenu guide de pêche ?

La pêche de la carpe, toujours du plaisir
La pêche de la carpe, toujours du plaisir

Nicolas Gavoille -J'ai eu la chance de naître dans une région où l'eau est omniprésente et grâce aux étangs familiaux, j'ai pu traquer les carpes ou les brochets dès mon plus jeune âge. J'ai eu mon premier moulinet à 6 ans et, avec mon ami d'enfance Philippe, nous passions notre temps à la pêche.

J'ai laissé de côté ma passion le temps de mes études et de ma première vie professionnelle, mais la passion est ensuite revenue au galop ! En effet, lorsque j'ai retrempé mes premiers leurres dans le lac de Charpal, en Lozère, je me suis remis sérieusement à la pêche à la mouche avec le guide Stéphane Faudon. Il était temps de mettre les écrans d'ordinateur de côté...

Avec l'arrivée de notre premier enfant, nous avions décidé avec Claire, ma compagne, de quitter la Lozère pour revenir dans notre région natale, changer complètement de vie professionnelle et nous lancer dans le tourisme. Le métier de guide de pêche m'est donc venu comme une évidence.

Quels types de produits de guidage proposes-tu ?

Nicolas Gavoille -J'ai la chance de vivre dans une région au domaine piscicole très varié : étangs, rivières de première et deuxième catégorie et de nombreuses gravières et sablières, je peux donc proposer une grande variété de produits.

J'ai guidé pendant des années des clients pour apprendre à pêcher à la mouche sur le bord de nos petites rivières des Vosges saônoises (Ognon, Breuchin...). Malheureusement, les populations de ces rivières ont trop souffert ces dernières saisons et les sécheresses à répétition m'ont poussé à arrêter ce produit tant les conditions sont devenues aléatoires. Je ne pratique donc plus le guidage en rivière, mais j'y pêche encore beaucoup pour mon plaisir personnel, à la mouche ou aux leurres. La frappe de la truite, quand elle attaque un leurre, est une sensation que j'avais oubliée et j'ai retrouvé beaucoup de plaisir dans cette pêche qui a vu arriver de nombreuses nouveautés ces dernières années chez Rapala VMC. Par exemple, la gamme Cheboo de VMC pour les pêches aux leurres souples avec des montages cheburashka ; et les leurres durs Rapala comme les Shadow Rap Solid Shad, spécialement développés pour la truite ou encore les Countdown Elite, version 2.0 du célèbre Rapala Countdown avec lequel nous avons tous pris des truites !

J'ai également proposé jusqu'à aujourd'hui des prestations d'initiation à la pêche du brochet aux leurres en float tube en casting. Activité très intéressante en tant que moniteur qui répond à une demande forte des clients qui veulent découvrir le float tube et surtout apprendre à régler et à utiliser les moulinets casting.

La traque des spécimens
La traque des spécimens

Mais, à partir de la saison 2023, j'ai choisi de me recentrer sur ma spécialité : la traque des spécimens. Au Domaine de la Patte d'Oie, nous avons un plan d'eau spécifique : Préhistoric-fishing et sa déclinaison « light » : le baby-Préhistoric sur lequel je réalise la majorité de mes guidages à la recherche des esturgeons et des silures. Il s'agit d'une pêche au feeder très technique. En effet, les esturgeons sont des gros poissons (record du domaine : 1,85 m pour 45 kg) mais qui ont un comportement et une façon de se nourrir très spécifiques, ce qui se traduit par des touches très difficiles à déceler et à ferrer. C'est une pêche vraiment prenante !

Je propose également de pêcher les esturgeons « à la chinoise », c'est une technique ancestrale qui nous vient d'Asie du Sud-est. Pour faire simple, cela consiste à pêcher avec une canne à coup télescopique très souple et résistante pour pouvoir combattre des spécimens pouvant dépasser les 30 ou 40kg sans élastique ou moulinet !

En guidage, je pratique deux versions de cette pêche : un mode « light » sur des poissons de quelques kilos, qui se prête particulièrement à l'initiation des plus jeunes ou à une animation scolaire par exemple. C'est très simple et ludique à mettre en œuvre et le rythme des touches est garanti grâce à la grande densité de petits esturgeons présents sur le plan d'eau. Et un mode « expert » où il faut sortir les « gros bras » pour tenir une canne avec une ligne d'une résistance de 50 kg, et un poisson de 20, 30 ou 40 kg au bout, en prise directe, sans amortisseur !

La gravière est mon dernier espace de jeu, à la recherche de carpes records et de silures. J'ai la chance de pouvoir pratiquer sur des plans d'eau privés fortement peuplés situés à 15 min du domaine. Je propose des prestations pour apprendre les bases de la pêche de la carpe en batterie : sonder son poste pour déterminer à quel endroit pêcher, clipper son fil pour pêcher et amorcer précisément au spod, technique de la pêche aux glaçons...

En plus des enseignements techniques, ces journées de pêche en gravière sont souvent l'occasion pour mes clients de battre leur record. Par exemple, lors du dernier guidage de la saison 2022 en gravière, les records sont tombés pour Bernard et son fils qui posent devant l'objectif avec 4 carpes de plus de 20 kg dans la journée dont une qui passe les 27 kg !

Enfin, j'organise des colonies pêche à destination des adolescents : la RAPALACADEMY ! Ce sont des stages multipêche, organisés au domaine de la Patte d'Oie : pêche de l'esturgeon au feeder ou à la chinoise, pêche de la carpe en gravière et pêche du silure. Nous en sommes à la 27ème édition de la RAPALACADEMY et il y a des stages organisés tous les étés.

Qu'est-ce qu'être guide de pêche pour toi ?

Nicolas Gavoille -Être guide de pêche pour moi, c'est d'abord vivre de ma passion. C'est un choix qui n'est pas si facile. On me dit souvent : « Nicolas, tu as quand même un beau métier ! ». Certes, je ne vais pas le nier ! Être au bord de l'eau, avec des personnes à qui transmettre sa passion, un jour où la météo est agréable et les poissons mordeurs, c'est le rêve ! Mais ce n'est pas le cas tous les jours, il y a des jours où le froid engourdit les doigts et pince les joues, il y a des jours où les poissons ne pensent pas à se nourrir...

Le guide de pêche a toujours ce petit pincement au cœur tant que le premier poisson n'est pas dans l'épuisette. Nous sommes probablement les seuls moniteurs à avoir cette obligation de résultat. Un moniteur de kayak est juste payé pour aller d'un point A à un point B, mais pour le moniteur de pêche, on rajoute ce défi de la prise d'un poisson.

Transmettre notre passion
Transmettre notre passion

Une fois le capot évité, être guide de pêche, c'est gratifiant : on transmet une gestuelle, un savoir et surtout des valeurs. La transmission, particulièrement auprès des plus jeunes, lors des stages que j'organise avec des ados est un élément très motivant. Leur apprendre à observer la nature pour localiser les poissons, à prendre soin de leur partenaire de jeu (la remise à l'eau des poissons doit s'accompagner de mesures nécessaires pour être faite dans les meilleures conditions possibles), à respecter les autres et à prendre plaisir ensemble au bord de l'eau. Ma meilleure récompense est de pouvoir suivre mes clients dans le temps, devenus autonomes au bord de l'eau, et de voir leur sourire sur les photos qu'ils partagent sur les réseaux sociaux.

Enfin, dans le guidage, on ne voit que le résultat le jour du guidage, mais le gros du métier se passe en amont : repérage des spots de pêche (jusqu'à la création, l'entretien, l'empoissonnement du spot quand on en est le gestionnaire), préparation du matériel et des appâts, et même préparation du repas de midi ! Un guide de pêche doit donc être polyvalent, c'est beaucoup de logistique, de préparation et de travail en amont pour assurer une journée de pêche confortable au client pour un maximum de plaisir au bord de l'eau.

Tu pêches ou pas lorsque tu es en guidage ?

Nicolas Gavoille -Ça dépend ! Du type de pêche : pour ce qui est de la pêche à la mouche, je ne prends pas de canne, c'est uniquement le client qui pêche. Et du nombre de personnes : si je suis seul avec le client, en float tube ou au feeder par exemple, je peux pêcher (généralement à la demande du client). C'est plus convivial et ça permet de trouver la pêche plus vite. Mais si je suis avec un groupe, je ne pêche pas et je me concentre sur l'encadrement des pêcheurs.

Que fais-tu lorsque tu ne guides pas ?

Nicolas Gavoille -Quand on gère un domaine de pêche, il y a pas mal d'occupations en dehors du guidage : tâches administratives, marketing (développement et mise à jour des sites internet, tournage de vidéos, etc.), entretien du domaine (tonte, entretien des plans d'eau, empoissonnements, divers travaux, etc.), constructions (j'ai réalisé personnellement tous les chalets du domaine).

La gestion du Domaine de la Patte d'Oie fait donc partie intégrante de ma vie, d'autant que ma compagne y travaille également. Nous arrivons toutefois à libérer un peu plus de temps en famille, maintenant que nous sommes bien installés, pour des petites escapades et notamment des voyages à vélo.

Quel regard portes-tu sur le guidage en France ?

La plus-value apportée par un guide de pêche
La plus-value apportée par un guide de pêche

Nicolas Gavoille -Sur le plan de la formation, le guidage est bien encadré par le diplôme BP JEPS Pêche de Loisir même si je pense que nous formons trop de guides. La sélection devrait être plus sévère parce qu'une fois dans le monde professionnel, les places sont chères et les guides qui en vivent vraiment sont très rares.

La demande pour le guidage reste très faible en France, les pêcheurs français ne sont pas prêts à investir dans le guidage, contrairement à d'autres pays, comme les Etats-Unis où le guidage est rentré dans les mœurs et les pêcheurs se sont rendu compte de la plus-value apportée par un guide.

Quel(s) conseil(s) aurais-tu à donner aux personnes qui souhaiteraient se lancer dans cette aventure ?

Nicolas Gavoille -Il faut avoir conscience qu'il est difficile de vivre exclusivement du guidage en France (très peu de guides y arrivent). La plupart du temps, le guidage rentre dans un projet de pluriactivité (comme moi, en complément de location d'hébergement par exemple). Le projet professionnel doit être bien ficelé avant l'entrée en formation.

Je conseille de ne pas faire la formation de guide de pêche trop tôt, c'est un métier qui demande de l'expérience dans de nombreux domaines, ce n'est pas un hasard si ce métier est souvent un projet de reconversion professionnelle, après une première expérience dans un autre domaine.

En tant que pêcheur quel est ton rêve ?

Nicolas Gavoille -Que nos rivières franc-comtoises retrouvent un bon état permettant aux populations de truites et d'ombres communs de se développer naturellement.

Je rêve également de partir aux Etats-Unis pour un road trip au long cours d'Est en Ouest avec une liste de projets (non exhaustive !) : tarpons et peacock à Miami, black-bass à la Nouvelle-Orléans, cutthroats, brookies dans le Montana, esturgeons sur la Fraser, bull trout et truites grises au Canada, arcs-en-ciel sauvages et steelheads....

Retrouvez Nicolas pour une pêche de specimen au feeder en vidéo :

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